Sur chaque cm2 de peau saine peuvent vivre au moins 1000 bactéries, voire beaucoup plus dans les zones humides comme les babines et les espaces entre les doigts. Cette flore normale est indispensable pour l’équilibre de la peau. Mais lorsqu’une plaie s’ouvre, les bactéries peuvent devenir dangereuses en s’attaquant aux tissus profonds. Une bonne cicatrisation dépend donc beaucoup de la qualité de la désinfection de la plaie qui est faite après le traumatisme.
Toujours bien désinfecter
Les deux couches externes de la peau, l’épiderme et le derme, ont une épaisseur totale inférieure à 2 mm. Même très fine, cette barrière de protection est évidemment essentielle pour empêcher les bactéries de pénétrer dans l’organisme. Dès qu’une plaie crée une brèche dans la peau, il existe un risque d’infection, plus ou moins grave selon l’importance de la plaie et les résistances immunitaires de l’animal.
Une infection minime ne fera que retarder la cicatrisation mais une infection plus importante pourra entraîner une extension de la contamination, l’absence de fermeture de la plaie, une suppuration chronique ou la formation d’un abcès. Chez un animal fragile (jeune ou immunodéprimé), une infection non contrôlée peut conduire dans le pire des cas à une septicémie mortelle pour l’animal.
Risque d’infection variable selon le type de plaie
Les coupures sont les plaies les moins susceptibles de s’infecter si elles sont bien traitées. Elles sont en général assez propres et les saignements abondants qu’elles provoquent diminuent partiellement la contamination. Plus les plaies sont étendues (lacération, arrachement de la peau), plus la contamination bactérienne est évidemment facilitée. lorsque les tissus environnants ont été de plus écrasés ou étirés (plaies contuses), leur dévitalisation augmente la vulnérabilité à l’infection.
Les abrasions sont des plaies de frottement.
Elles sont dangereuses parce que la plaie est souvent contaminée par les débris et les micro-organismes de la surface abrasive (ex : le sol).
les piqûres sont dangereuses car on les remarque alors que l’infection est déjà installée. la piqûre facilite le développement de germes le long du trajet de l’objet ayant pénétré la peau (ex : le croc d’un chat). Dans une plaie étroite et profonde, le pus créé par l’inflammation ne peut pas être évacué et s’accumule alors pour former un abcès.
Le temps est compté !
Durant les six premières heures après le traumatisme, le nombre de bactéries dans la plaie reste limité. C’est le temps qu’il leur faut pour « préparer le terrain » à l’infection. Il est donc très important de désinfecter le plus tôt possible. Six à douze heures après le traumatisme, la multiplication des bactéries s’accélère considérablement.
L’infection n’est pas encore visible mais, si la plaie est refermée sans avoir été d’abord nettoyée, elle risque de s’aggraver.
Si la désinfection a lieu 12 heures après le traumatisme, même si la plaie paraît propre, les bactéries ont eu le temps de se disséminer dans les tissus voisins de la plaie et le risque infectieux est aggravé. Dans une plaie infectée, on peut compter plus d’un million de bactéries par gramme de tissu !
Nettoyez la plaie
lorsqu’une plaie est superficielle et qu’une consultation vétérinaire ne paraît pas s’imposer, commencez par nettoyer la plaie en enlevant, si nécessaire, les corps étrangers incrustés dans la peau. Si les poils autour de la plaie gênent le nettoyage, n’hésitez pas à les couper.
Nettoyez largement la peau autour pour éviter la contamination par les germes périphériques. Un savon détergent à base de chlorhexidine ou de povidone iodée à 10 % sera très efficace. Attention cependant à ne pas appliquer ces produits (idem si vous utilisez une solution à base d’alcool) directement dans la plaie : ils sont irritants et risquent de léser les tissus et d’altérer la cicatrisation.
Passez ensuite à l’étape de lavage de la plaie, avec des compresses imbibées d’un liquide adapté : une solution de lactate de Ringer est très indiquée, à cause de son pH neutre et de sa composition proche des liquides physiologiques. Une solution de chlorure de sodium à 0,9 % peut aussi être utilisée. A défaut, le nettoyage d’une plaie sale peut éventuellement être réalisé à l’eau courante. Attention cependant à ne pas appliquer une pression d’eau trop élevée sur la plaie si les tissus sont fragilisés. Cela risquerait de faire pénétrer les bactéries plus profondément.
Choix du désinfectant
l’efficacité des désinfectants est souvent diminuée par les débris organiques qui souillent la plaie.
l’étape de désinfection proprement dite doit donc toujours être précédée d’un nettoyage soigneux.
• la chlorhexidine diluée (de 0,02 à 0,05 %) est un antiseptique très efficace. Elle est peu inhibée par la matière organique, elle n’entraîne pas de risque d’absorption ni de toxicité et elle est active jusqu’à 48 heures après une seule application. Seul problème, il existe des bactéries résistantes à la chlorhexidine.
• le second antiseptique le plus utilisé sur les plaies en médecine vétérinaire est la povidone iodée à 1 % (Vétédine solution®). Il n’y a pas de résistance bactérienne décrite et elle agit aussi sur de nombreux champignons. En revanche, elle est moins efficace que la chlorhexidine sur les plaies sales, sa durée d’action ne dépasse pas 4 à 6 heures et elle pourrait parfois retarder la cicatrisation. D’autres solutions iodées existent, dont la formulation permet d’éviter ces inconvénients.
• le pouvoir effervescent de l’eau oxygénée à 3 % justifie parfois son utilisation dans les plaies souillées. Son action antiseptique est cependant très limitée et elle est fortement inactivée par les matières organiques. Très irritante, son application directe sur la plaie est douloureuse.
• l’effet antiseptique de la solution de Dakin (hypochlorite de sodium) est lié à la libération de chlore et d’oxygène qui tuent les bactéries. l’emploi de cette solution est souvent déconseillé sur les plaies car son caractère irritant retarde la cicatrisation. Il existe encore de nombreux autres antiseptiques pouvant servir à la désinfection d’une plaie chez un chat ou un chien (ammoniums quaternaires, acide acétique, composés phénoliques halogénés, dérivés mercuriels…). Des solutions à usage vétérinaire sont également commercialisées, qui associent plusieurs produits. Votre pharmacien pourra vous conseiller utilement sur le choix des produits à avoir en permanence dans votre pharmacie à la maison ou en voyage.
Les limites de l’emploi des antiseptiques
les antiseptiques servent à nettoyer la peau lésée et sa périphérie. Ils n’ont pas pour but de stériliser la plaie car la contamination et la colonisation bactérienne de la plaie font partie de l’évolution physiologique. Ils visent simplement à réduire le nombre de bactéries présentes en surface et d’empêcher ainsi l’infection.
Lorsqu’une plaie est très profonde, l’antiseptique ne peut pas atteindre les bactéries qui ont été inoculées. De même, en cas d’infection déjà présente (avec présence de pus), les antiseptiques ne suffisent généralement pas à contrôler le développement des bactéries et d’autres moyens de lutte doivent alors être employés ; c’est le vétérinaire qui est le mieux placé pour décider des outils à utiliser.
Il est également inutile d’appliquer des antiseptiques plusieurs jours de suite sur une plaie en cours de cicatrisation où rien d’anormal n’apparaît. les antiseptiques peuvent en effet avoir des effets plus néfastes que bénéfiques sur la cicatrisation, en freinant la formation des nouveaux tissus.